Olivier Lichý

* 1960

  • « Il y avait une voiture militaire tchèque, avec trois garde-frontières, deux chiens, et quand on est arrivé, ils nous ont pointé la mitraillette ou le pistolet-mitrailleur sur nous. Quand tu as 11 ans, ça marque. Mes parents n’ont pas eu besoin de me l’expliquer. À 11 ans, tu comprends les choses, quand t’as 5 ans non, mais quand t’as 11 ans, tu vois bien quand on te demande de te taire à la frontière, que tu attends 3 heures pour passer à la frontière, et que quand tu passes on te fait enlever tes chaussures, tes chaussettes pour montrer qu’il n’y avait rien dedans, tu comprends très vite ce qu’est une dictature, et tu apprécies encore mieux ce qu’est la liberté et la démocratie quand tu arrives en France ».

  • « En 1990, il y avait toujours des sokols à l’étranger, et tous les 4 ans, on organisait une réunion de ceux-ci. Cette année-là, le slet a eu lieu à Paris et deux mois après, en juillet 1990, le sokol tchèque a existé de nouveau et a organisé un petit slet à Prague. Évidemment, on s’est réuni là-bas, et avec beaucoup d’émotions parce que, lorsqu’on a défilé, il y avait plein de monde autour du défilé et des grand-mères qui pleuraient, nous saluaient. C’était très émouvant ».

  • « Mon père avait commencé à faire de la politique, mais il était dans un parti opposé au parti communiste. Quand les communistes sont arrivés au pouvoir en 1948, ils ont commencé à mettre des gens en prison parce qu’ils ne pensaient pas comme eux. Mon père habitait à Znojmo, pas très loin de l’Autriche, et comme il avait un copain qui était garde-forestier, qui connaissait la forêt comme sa poche, il savait parfaitement où passer la frontière sans se faire repérer par les douaniers. Quand les communistes ont commencé à mettre des gens en prison, le parti dans lequel mon père était a organisé des évasions de personnes emprisonnées, ce qui passait ensuite par sa filière, puisqu’il avait organisé tout ça. Mais les policiers tchèques sont pas plus bêtes que mon père était intelligent, donc quelques mois après, les communistes sont arrivés au pouvoir en février 1948, et en mai 1948, il avait déjà fait partir un certain nombre de personnes, mais les policiers tchèques ont réussi à découvrir cette filière, et mon père, dont le père était gendarme, a été prévenu que les policiers allaient venir l’arrêter le lendemain. Il a donc réuni ses camarades, puisque 3 personnes étaient avec lui pour organiser la filière d’évasion, donc en mai 1948, mon père s’est sauvé, pour ne pas être emprisonné ».

  • Full recordings
  • 1

    Paris, Česká škola bez hranic Paříž, 27.11.2021

    (audio)
    duration: 48:14
    media recorded in project The Stories of Our Neigbours
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Faire partie du Sokol, c’est déjà faire de la politique, même si tu te réunis pour jouer au volleyball ou aux cartes, voire manger des knedlíky

Olivier Lichý, 2021
Olivier Lichý, 2021
photo: Post Bellum

Olivier Lichý est un magistrat français né en 1960 à Paris. Son père est tchèque, originaire de Znojmo [Moravie-du-Sud] et sa mère est française, originaire de Paris. Il raconte l’histoire de son père, opposant politique ayant fui le renversement de la troisième république tchécoslovaque après l’arrivée d’un régime communiste en février 1948. Après être arrivé en France, son père rejoint rapidement le Sokol de Paris, une association sportive et patriotique dans laquelle les réfugiés tchèques anti-communistes se retrouvaient. Olivier participe également aux activités du Sokol à partir de ses 13 ans, en pratiquant le volleyball, la gymnastique et la danse folklorique tchèque. Il raconte également ses voyages d’enfance en Tchécoslovaquie, à partir de 1967, dans laquelle il a pris conscience de vivre sous un régime dictatorial. En 1986, il participe à un slet [rassemblement de masse] organisé à Zurich, puis à Paris en 1990 et à Prague cette même année, juste après la chute du régime communiste.